Let England Shake : PJ Harvey calling
par E.M
Juillet 2011. Le temps est à la pluie dans cette plaine du grand ouest. On est à Carhaix. Vieilles charrues. PJ Harvey est entrée sur scène telle une guerrière. Toute de noire vêtue, ornée de son étrange coiffe de plume, la voilà qui s'avance armée de sa harpe pour revendiquer "Let England Shake".
Ce concert est magnifique et classieux, bien que révélant une gravité et une noirceur qui n'avaient rien de prémonitoires...L'artiste interprète la plupart des chansons de son dernier album dans lequel elle pointe les conflits et guerres qui ont façonné l'Angleterre, ainsi que les dérives de son pays. Mais c'est juste de la musique.
Hein c'est juste de la musique ?
Un mois plus tard l'Europe s'émeut des violences que subit l'Angleterre. Dans tous les coins, on se fait fort d'en donner les raisons. La politique du gouvernement britannique y serait pour beaucoup. Très libérale et s'accompagnant de restrictions des mesures sociales (fermetures de nombreuses associations locales de soutien et d'entraide par exemple), que tout à coup la crise financière a stigmatisée. De plus, le contexte sociogéographique de Londres donnerait une autre ampleur à ces violences : en effet à la différence d'autres capitales, les quartiers aisés jouxtent ceux des pauvres...ainsi les violences s'expriment en plein coeur de Londres.
Une presse hative aimerait bien connaître les revendications des émeutiers. En vain pour l'instant. On se complaît à constater que ceux-ci s'en prennent uniquement aux magasins de vêtements qu'ils pillent...s'étonnant qu'ils ne s'attaquent pas aux symboles de l'état : ministères, commissariats...On a vite fait de les qualifier de casseurs. Cela arrange bien...Mais le sont-ils tous vraiment ?
Et l'on nous ressert l'utilisation des réseaux sociaux comme moyen d'action...
Quelle est donc cette tendance bien contemporaine à refouler des problèmes profonds sous les clichés de la sociologie ? Bien entendu il faut condamner fermement les émeutiers. Mais on ne doit pas pour autant fermer les yeux sur les responsabilités des gouvernements et des systèmes économiques qui ont créé ces différences sociales. Ces inégalités. Une société qui ne donne pas les moyens de donner des chances de vivre (et non de survivre) à tous ses membres, en donnant à chacun la possibilité d'acquérir des connaissances, d'apprendre...une société qui ne donne pas les clés pour ne pas forcer des serrures...va droit dans le mur...
La liberté des artistes.
Et l'on nous ressert l'utilisation des réseaux sociaux comme moyen d'action...
Quelle est donc cette tendance bien contemporaine à refouler des problèmes profonds sous les clichés de la sociologie ? Bien entendu il faut condamner fermement les émeutiers. Mais on ne doit pas pour autant fermer les yeux sur les responsabilités des gouvernements et des systèmes économiques qui ont créé ces différences sociales. Ces inégalités. Une société qui ne donne pas les moyens de donner des chances de vivre (et non de survivre) à tous ses membres, en donnant à chacun la possibilité d'acquérir des connaissances, d'apprendre...une société qui ne donne pas les clés pour ne pas forcer des serrures...va droit dans le mur...
La liberté des artistes.
Au regard des carences des médias et des politiques, les artistes eux sont libres. Libres de préférer. De choisir. De dénoncer. Certains d'entre eux sont visionnaires, obervateurs de leur époque. Dès lors, l'art peut aussi aider à comprendre les problèmes de notre société. En remettant de la poésie.
Mais là nous revient ce texte de Leo Ferré :
"A vos plumes poètes, la poésie crie au secours, le mot Anarchie est inscrit sur le front de ses anges noirs; ne leur coupez pas les ailes! La violence est l'apanage du muscle, les oiseaux dans leurs cris de détresse empruntent à la violence musicale. Les plus beaux chants sont des chants de revendication. Le vers doit faire l'amour dans la tête des populations. A l'école de la poésie, on n'apprend pas: on se bat."
Et avec ce texte l'ange noir envahit nos pensées. Sublime. Fragile et determinée à la fois. PJ Harvey est d'une grâce inouïe.