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Films, lieux, spectacles, société


La maison de Pierre Loti : des rêves d'ailleurs

 

par E.M

 

 

 

 

Soleil radieux et ciel bleu, 25° au compteur, le printemps fait une arrivée remarquée ! On en profite pour s’offrir une échappée en Charente-Maritime.

 

A Rochefort, la maison de Pierre Loti nous accueille pour une visite dépaysante. C’est le moins que l’on puisse dire…Le célèbre écrivain et marin a transformé la maison familiale au fil des années. Pour en faire un lieu de curiosités et aujourd’hui un musée. Pourtant en arrivant dans la rue, la façade ne laisse rien paraître. Une maison de ville des plus classiques.

 

 

 

 

Même la visite débute par une pièce morose et sombre : le salon rouge. Les quelques têtes de pipe en peinture, accrochées au mur et réalisées par la maman, ont au moins le mérite de nous aider à mieux connaître la famille de Pierre Loti.


Et puis durant près d’une heure, la visite nous entraîne tour à tour dans les différentes pièces de la maison. Parmi lesquelles la salle renaissance, la salle gothique ou la mosquée nous donnent une idée de la démesure du personnage. De son amour des voyages aussi. De sa passion pour la Polynésie et la Turquie.

 

 

 

 

Le petit bonhomme (1m63) avait semble-t-il la folie des grandeurs. C’est de ses voyages à travers le monde qu'il rapporte les objets et décors qui habilleront sa demeure. Tel ce plafond de mosquée qu’il a récupéré d’une véritable mosquée à Damas en Syrie. Un édifice qui avait brulé.

Ou bien la stèle funéraire de sa bien-aimée Aziyadé, que Loti aurait volé à Istambul en la remplaçant par une autre.

 


 

"On peut toujours rêver de s’en aller mais sans bouger de là…"

 

 

En reconstituant ces pièces au parfum du passé et teintées d’exotisme, Loti n’avait pas la rigueur de l’authenticité. C’était le romancier qui s’exprimait, laissant parler son cœur et son imaginaire.

Le cadre était alors propice à se laisser emporter. Là où les souvenirs le ramènent. Indéfiniment. Ailleurs.


Il n’y a qu’une marge infime entre l’esprit vagabond et romantique de l’écrivain, et le comportement dual et trouble du personnage…Ainsi au cours de la visite, on découvre que la démesure de Pierre Loti se traduisit aussi par des fêtes grandioses. L’incroyable demeure était le théâtre de soirées déguisées, où des célébrités arrivaient ainsi de Paris par le train, déambulant dans les rues de Rochefort jusqu’à la maison. Les habitants de la ville étaient autorisés à venir défiler pour apercevoir le spectacle.

Etrange aussi cette rencontre à Hendaye avec une jeune femme basque, en dépit de son mariage. Bon cela n’aurait pas été la première fois qu'un mari trompe sa femme. Mais de là à ramener sa maîtresse à Rochefort et à l’installer dans une maison de la ville…et lui faire quatre enfants…


Mais on aura l’exigence de saisir les complexités et, en ce lieu magique, de faire sa part au mystère. Un endroit qu’il vous faut vite aller voir puisqu’il fermera bientôt pour plusieurs années, tant la maison nécessite des travaux de restauration. A nous, il nous aura donné envie de découvrir l’œuvre de Pierre Loti.


 


 

De son vrai nom Julien Viaud (1850 – 1923), il emprunte ce pseudo du surnom que lui donna la reine Pomaré, lors d’un voyage à Tahiti. Loti étant le nom d’une fleur tropicale.

L’écrivain voyageur fut membre de l’académie française et laisse derrière lui des romans aussi célèbres que Pêcheur d’Islande ou Aziyadé.

 

 



31/03/2012
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J'ai 34 ans et je n'ai rien : Oslo 31 août

 

par E.M

 

 

 

 

Le film de Joachim Trier est une œuvre dense. Qui prend au corps et aux tripes. Il est inspiré du roman Le Feu follet de Pierre Drieu La Rochelle, déjà adapté au cinéma par Louis Malle  en 1963.

 

 

Oslo 31 août raconte l’histoire d’Anders, ex-junkie sur le point d’en terminer avec son sevrage. Est-ce l’effet de son traitement ou bien le cap de la trentaine qu’il vient de franchir ? Toujours est-il que le personnage principal est en pleine désillusion. On le suit 24 h durant chercher à retrouver un sens à la vie…


 

 


 


Anders est autorisé à sortir de son centre de traitement pour aller à Oslo passer un entretien pour un travail. Cela fait partie du processus de guérison.

En se rendant dans cette ville, il revient sur les pas de sa vie. Ce sont alors des amis que l’on retrouve. Des souvenirs qui défilent comme un bilan de sa propre histoire.

En cheminant dans Oslo, il croise des vies, des envies, des portraits, des chemins et des idéaux qui défilent. Ceux des autres comme des peintures. La scène est saisissante à ce café où il capte des conversations anodines. Comme autant de possibilités auxquelles se raccrocher. Mais en terre d’Utopie, il semblerait que les courants de l’amer soient devenus trop forts…


Pourtant, ce sont mille bonheurs qui s’offrent à  lui. Qui lui tendent les bras. Il n’y a qu’à se baisser pour les ramasser.  Mais Anders ne peut pas. Il n’y a plus l’envie. Ou bien trop de lucidité sur la vanité des choses et la futilité des gens. Toutes ces postures pour faire semblant lui deviennent insupportables.

On ressent comme un sentiment de gâchis, décuplé par la personnalité d’Anders. La pureté du bonhomme (ou l’impureté on se sait plus). Son intelligence. Sa culture. Sa beauté. Sa lucidité sur le néant qu’il a construit, et sur le mal qu’il a causé à ses proches.

C’est fou cette impression visuelle qu’il donne d’être là, et en même temps d’être ailleurs. Une sorte de mélancolie comme une musique en notes de solo improvisé.

Vous flippez là ?

 



Et puis il y a a cette ville dont Joachim Trier nous délivre les images. Oslo. Si présente. Si jolie. Trop étroite pour le personnage, lequel en connaît chaque recoin. Un paradoxe que vient stigmatiser cette quête d’identité et ce sentiment de perte. Le réalisateur filme l’absurde.

Une ville recelant bien trop de tentations. Et tandis que cette peinture défile là devant nos yeux, il y a le désir de la drogue. Ou plutôt le non désir de la vie mais celui de l’overdose, comme une envie de suicide…


Anders va-t-il plonger juste une dernière fois ? Se souvenir de gestes maintes fois répétés... Comme de la partition du piano de l'enfance. Et celle de la seringue pour aller tutoyer les anges et en finir. Sans surprise ?


Avec Oslo 31 août, Joachim Trier filme les tréfonds de l’âme d’un jeune dandy moderne au bord du vide. 24 heures de la dérive d’un homme vers le suicide.

 

 A présent, on écoute une chanson de Radiohead dont les paroles et la vidéo résonnent étrangément : "Silent. Silent. This is my final fit. My final bellyache with. No alarm and no surprises..."

 

 
 

 

 

 

 



06/03/2012
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Pierre & Alexandra Boulat. Deux regards. Deux générations

 

par E.M

 

 

 

 

 «Les images, à leur maximum de passion et de vérité, possèdent le même pouvoir que les mots. Si elles ne peuvent apporter de changements, elle peuvent, au moins, nous fournir un miroir non faussé des actions humaines et ainsi provoquer un réveil des consciences». 

 

 

Tout commence avec cette phrase de Robert Capa. On est à la Base sous-marine de Bordeaux (33) qui consacre jusqu'au 18 mars une exposition à la famille BOULAT, reporter-photographe de père en fille.

Cette exposition s’inscrit dans un cycle intitulé "Photographes pour l'Histoire", offrant des images de photojournalistes à travers le monde. Des hommes et des femmes qui ont  eu à cœur de montrer l'Histoire en train de se faire.

 

Pierre & Alexandra Boulat. Deux regards. Deux générations rassemble une collection d’images qui permet de sonder les ressemblances et les différences entre ces deux regards : masculin versus féminin. noir et blanc versus couleur, événements historiques de leur époque respective …

 

Il y a chez le père (1924 -1998) la simplicité dans la prise de vue. Les photos en noir et blanc y sont surement pour beaucoup. On perçoit la légèreté d’un monde plein d’espoir et qui se reconstruit : c’est la période de l’après-guerre et des 30 glorieuses.

 

 

 

 


 

1958 Les Algériens en train d'écouter De Gaulle leur dire qu'il les a compris.

 


  

 

 

1957 Le premier jour, face-à-face d'une nouvelle recrue avec son capitaine instructeur.

«Tu as un mois pour perdre ton double menton»... «Yes Sir!»

 

 

 

Quant à Alexandra (1962 - 2007), elle est le témoin d’une époque sombre. Celle des tumultes mondiaux dans les années 90, tels que  la guerre en ex-Yougoslavie, le conflit israélo-palestinien... La couleur de ses photos exacerbe l’esthétisme et l’expression des sujets. Tout ce qu’il y a lieu de ressentir se ressent comme jamais : la douleur, la noirceur et la violence d’un monde en mutation. Où cultures, croyances et différences s’entrechoquent.

 

 

 

 

 

Des images qui nous montrent aussi, que l’humanité n’a pas retenu les leçons de l’Histoire. Telle cette photo intitulée Transport de kosovars vers un camp de réfugiés, 1999.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Est-ce son oeil féminin qui conduira Alexandra a réalisé des travaux, autour de La Femme dans l’Axe du Mal en Afghanistan, Iran, Moyen Orient et Gaza ?

Toujours est-il que son regard rejoint parfois celui de son père, lorsque tous les deux photographient le défilé d’Yves St Laurent avec 40 années d’intervalle.

 

 

Avec un peu de recul, on se dit que les deux photojournalistes sont aussi le reflet de leur génération, dans la manière dont on consomme l'information.  L'évolution est palpable là devant nous. D'un temps où il fallait tendre l'oreille pour écouter les nouvelles en différé à la radio, on est passé à une ère où l'on voit en direct les chars qui entrent dans les villes et les tours qui s'effondrent... Alexandra a pratiqué son métier, au moment où la valeur des images devenait aussi prépondérante que les faits qu'elles relataient.

 

Avec une sensibilité qui leur est propre, Pierre et Alexandra sont les témoins de leur époque. Des temps différents. Qui se côtoient et se confrontent dans cette salle d’exposition à flots de Garonne. Comme une évidence. 

 

  

 

 


24/02/2012
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La musique : stratégie de communication des marques

 

par E.M

 

 

 

 

Mais qu'est-ce qu'elles ont toutes  ? Le marketing musical est devenu un nouveau territoire de communication des marques. Il permet de véhiculer une image moderne et d'incarner des valeurs plus fédératrices que le sport business. La musique est aussi et surtout un moyen d'atteindre une cible jeune. 


Le phénomène s'exprime de différentes manières. C'est le Crédit Mutuel qui avait "donné le la" à cette tendance. Au moyen de parrainages d'émissions Radio et TV telle que Taratata, ou de partenariats avec des concerts ou de grands festivals comme Le Printemps de Bourges. La banque mutualiste avait mis le paquet pour associer son image à la musique.

Dans les campagnes de publicité ensuite où la musique peut être un choix prépondérant pour capter la cible choisie. Bien entendu le phénomène a toujours existé me direz-vous. On se souvient par exemple du spot de la marque Renault avec la musique "Johnny and Mary"de Robert Palmer.
 
 

 
 
"Johnny's always running around, Trying to find certainty...". Eh ouais Jonnhy, tu cours. Mais fallait pas partir en Renault !

Ces dernières années, le parti pris serait plutôt de tenter le pari d'une chanson nouvelle. Soit l'utilisation de titres musicaux permet aux artistes renommés de bénéficier d'une fenêtre d'exposition pour le lancement de leurs albums (The Strokes, Baxter Dury, Justice...). Soit cela donne l'occasion aux maisons de disques de faire connaître de nouveaux groupes, comme ce fut le cas avec The Tings Tings en 2008 dont la pub Apple a lancé la carrière. Et en plus cela coûte moins cher à l'annonceur...
 
 

 

Un autre exemple aussi avec la marque de fringues The Kooples. Celle-ci s'est tout simplement lancée dans la musique avec son concept The Kooples Records. Elle enregistre des albums compilations de couples, sur scène comme à la ville.
 
Sur les médias sociaux aussi

Alors que l'on croyait le vidéo clip de papa sur le déclin, dans un contexte de crise de l'industrie musicale où fabriquer un CD est devenu compliqué, voilà que le clip est en plein renouveau. Et cette renaissance est liée à l'émergence des réseaux sociaux, les marques commençant à intégrer qu'elles doivent être là où les jeunes se trouvent...

Ainsi avec l'essor d'internet et des outils numériques, elles commencent à s'adapter à ces nouveaux comportements et profitent des plates-formes de diffusion (You Tube, Dailymotion, Facebook). C'est le cas de la Caisse d'épargne qui organise avec Esprit Musique un concours de jeunes talents en ligne.

En quelque sorte,  le radio-crochet à l'ère du Web 2.0 ! 


Birdy Hunt - Furies and Lights - Concert Jeunes... par EspritMusique

 
Si vous avez loupé qu'il s'agit de la Caisse d'épargne, alors vous avez surement un problème de vue. Avec la viralité des réseaux sociaux, le clip fait un joli voyage sur le web. Un bénéfice mutuel pour la banque qui gagne en visibilité auprès de sa cible, et pour les groupes qui ont une exposition inéspérée. Un excellent moyen de faire connaître leur musique.

De son côté, la société générale promeut sa carte bancaire jeune à travers l'opération Job So Music. Une opération qui se déroule l'été où deux équipes de reporters musicaux couvrent les grands festivals (Rock en Seine, Sziget,...) et partagent leurs aventures sur le blog So Music et les réseaux sociaux.

En résumé, des opportunités nouvelles pour les artistes de faire connaître leur musique et laisser libre cours à la création. Que les plus traditionnels se rassurent. Il reste encore les premières parties de concerts et les bonnes vieilles caves voûtées, pour découvrir les artistes de demain...
 


08/02/2012
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Tu ne vas pas m'abandonner toi aussi - Louise Wimmer

 

par E.M

 

 

 

 

Voilà, il est arrivé. L'hiver que l'on semblait attendre. Il fait froid...Alors on choisit de s'enfermer dans la chaleur d'une salle de ciné. Pour oublier la crise, et la morosité ambiante.
Avec Louise Wimmer c'est raté !
 
 
 
 
 
 
Cyril Mennegun décrit le quotidien d'une femme de 50 ans, confrontée à la précarité après une séparation. Louise fait des ménages pour joindre les deux bouts.  Elle vit dans sa voiture, se douche dans les toilettes ou sur les aires d'autoroute...Son objectif est de trouver un appartement et de repartir de zéro.
C'est la rage et la volonté de rester digne qui la pousse à s'accrocher. Insoumise pour rebondir. Louise n'appelle pas à la compassion.
 
 
Ce film est porté par son actrice principale Corinne Masiero, diamant brut de simplicité. Comme un documentaire il est une plongée dans les classes moyennes. Il pointe l'ombre du déclassement que craint cette partie de la population. Voire même auquel elle est confrontée. Et l'absence de fraternité ou d'humanité...

Comme le terme d'ascenseur social apparaît bien désuet tout à coup. Un ascenseur ne fonctionne que s'il a un moteur, s'il y a du lien. Du lien social...Or le film met en exergue une catégorie repliée sur elle-même. Qui privilégie la philosophie du "chacun pour soi". Comme lorsque la toute jeune collègue de Louise n'a eu aucune reconnaissance pour celle-ci, qui l'a aidée à sauver sa place, et tente de faire embaucher une connaissance...

Dans ce contexte détonnant, Cyril Mennegun use d'une métaphore pour décrire le rapport à l'objet d'une société en manque de lien. Avec cette voiture qui est un peu le 2e personnage du film. Le refuge de Louise. Une confidente bien usée elle aussi à qui Louise supplie de ne pas l'abandonner.  Un soutien qui ne veut pas fermer sa gueule en balançant du Nina Simone à chaque démarrage...
 
 

 
 
 
Dans un contexte de crise économique et sociale, et plus seulement financière, quels discours tiennent nos politiques en cette année électorale ? Des débats ? Quels débats ?!
On a surtout droit à une guerre de petites phrases et des attaques tous azimuts. On surfe sur la perte du triple A d'un côté. On se moque du "catastrophisme rustique" de Hollande de l'autre...Les médias en font leurs choux gras et s'en contentent bien.

Cette chronique ne fait pas dans le pessimisme. Comme un symbole Nina Simone, avec de la douleur en elle, est à la fois sublime, sombre et lumineuse. Un exemple de femme insoumise.

Face aux carences de nos plus hauts représentants et des médias, Louise Wimmer est un film politique. Comme un rêve. Celui de la promesse d'un nouveau départ.
 
   
 
 
 
 

17/01/2012
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